The Queen

Un film de Stephen Frears,
avec Helen Mirren, Michael Sheen et James Cromwell,
Angleterre, France, Italy, 2006, 97 min.


La place de la reine d’Angleterre, au Canada, se résume maintenant qu’à son visage frappée sur la monnaie. Dans le vieux pays, son rôle est toujours important. Bien plus qu’une mascotte internationale, la reine conseille, encore aujourd’hui, le premier ministre élu démocratiquement dans les affaires de l’état. De plus, la fascination du peuple britannique pour les faits et gestes des membres de la cour actuelle (Prince Charles, Prince William, Prince Harry) ou d’autrefois (Fergie, Diana) n’a de bornes que celles établies par les journaux à potins. Autant dire qu’elle n’en a pas. Ce phénomène particulier a incité Stephen Frears (Dangerous Liaisons) à tourner un film sur le sujet.

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Pour en observer et en étudier toute la démesure, aucun moment ne peut s’avérer plus pertinent que les jours entourant le décès de Lady Di. Pendant une semaine, la reine a refusé de commenter l’évènement. La population britannique, encouragée par la presse à scandales, s’est enragée contre la famille royale. Quelles raisons motivaient le mutisme de la reine? Tony Blair a-t-il profité de la situation pour mousser sa propre popularité? Comment le Prince Charles a-t-il réagit au décès de son ancienne flamme? The Queen propose des explications à ces questions.

Du début à la fin, même si les évènements nous sont connus, Stephen Frears réussit à conserver notre attention en cultivant différentes dichotomies. L’énergie provoquée par l’opposition de valeurs opposées dans The Queen, qu’il s’agisse de l’opposition du public au privé, de la nation à la population, du modernisme au conservatisme ou plus formellement, de la fiction au documentaire, propulse le film.

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Une scène démontre très bien ce constat. Tony Blair téléphone à la reine pour l’implorer de mettre un drapeau en berne au sommet du palais de Buckingham. Blair, qui se trouve dans une pièce en désordre meublée par Ikéa où l’on aperçoit un ordinateur, parle dans un téléphone sans fil. À l’autre bout du fil se trouve la reine, debout dans une luxueuse bibliothèque, qui parle dans le cornet d’un téléphone à roulette. Elle refuse de mettre le drapeau en berne puisque c’est contraire aux moeurs de la cour de faire voler un drapeau au sommet d’une demeure royale si la reine n’y est pas présente. Quant à la confrontation entre le cinéma documentaire et de fiction, il tient à l’aspect biographique du film ainsi qu’à l’emploi très fréquent d’images d’archives qui place le film dans un contexte très réaliste. Le seul point qui agace, c’est l’effort déployé par le scénariste Peter Morgan pour créer des scènes symboliques. Vous comprendrez quand vous verrez le cerf.

Plusieurs vantent, avec raison, la performance magnifique de Helen Mirren dans le rôle d’Elisabeth II. On prétend même qu’elle a des chances de remporter l’Oscar de la meilleure actrice. Le rôle s’y prête bien puisque les personnages connus (Ray Charles, Truman Capote, Virginnia Wolf) partent toujours avec une longueur d’avance. Cependant, Cher a déjà remporté un Oscar, alors tout est possible.

Pour un coup d’oeil privilégié à une institution mythique, pour apprécier le travail efficace d’un réalisateur talentueux et pour observer le jeu d’une actrice au sommet de son art, regardez The Queen.