Un film d’animation de Brad Bird, États-Unis, 2007, 110 merveilleuses minutes.
Drôle, touchant et intelligent. Un bon film se contente souvent d’une seule de ces qualités. Ratatouille les réunit dans une délicieuse recette qui plaira à tous et ce, pour de nombreuses années. Vraiment, pour ne pas apprécier l’histoire de Remy, un rat parisien qui utilise le gentil et maladroit Linguini comme marionnette afin de réaliser son rêve de devenir cuisinier, il faudrait être dépourvu d’une âme.
L’intrigue principale s’articule autour de la maxime suivante: n’importe qui peut cuisiner. En d’autres termes: quand on veut, on peut. Si cette prémisse usée vous ennuie, sachez qu’une multitude d’autres fils viennent étoffer le récit. Ceux qui prétendent que la place d’une femme est dans la cuisine n’ont probablement jamais mis les pieds derrière les portes battantes d’un grand restaurant. Le personnage de Colette démontre que pour faire sa place dans cette jungle, il faut agir en lionne. L’antagoniste Anton Ego, le plus cynique des critiques culinaires de la capitale française est le moteur d’un lucide et pertinent commentaire sur l’art et l’importance de l’étudier. Son look funestre, de son physique filiforme à son immense cercueil qui lui sert de bureau en passant par sa machine à écrire en forme de crâne restera gravé dans la mémoire des jeunes spectateurs.
Parlant de style, au départ, l’apparence des rongeurs déstabilise un tout petit peu. Leur pelage, leurs oreilles et leur museau s’approchent énormément du photo-réalisme. Par contre, les yeux et la bouche des vermines ressemblent davantage à ce qu’on retrouve dans un film de Mickey. On dirait que les animateurs ont simplement dessiné des yeux et une bouche sur des vrais rats. Par contre, les gestes très humains des créatures redonnent aux personnages le look cartoon approprié. D’ailleurs, une notice apparaît dans le générique à l’effet qu’aucun mouvement n’a été recréé en utilisant la « motion capture ». Il en résulte malgré cela des gestes précis et naturels.
Les mouvements de caméra virtuels et le montage permettent de suivre avec aisance les trépidantes séquences d’action qui agrémentent le film. La première apparition de la souris dans la cuisine du restaurant Gusto ressemble aux plus imaginatives séries de cascades et acrobaties de Buster Keaton, mais portée à un autre niveau en raison de la pleine liberté que procure le cinéma d’animation.
Il est plus que temps qu’un long métrage d’animation remporte l’Oscar du meilleur film. Ratatouille le mérite autant que n’importe quel autre dessin animé de l’histoire du cinéma. Ce que Brad Bird et l’équipe de Pixar ont accompli tient presque du miracle. Comme le dit John Lassenter, réalisateur de Cars et Toy Story I et II: « There’s a level of depth, complexity and humour to this film that I don’t think any Pixar film has before » (Il y a un niveau de profondeur, de complexité et d’humour dans ce film que je ne crois pas qu’on retrouve dans un autre film de Pixar). Il a raison, au niveau technique, stylistique et narratif, Ratatouille est simplement magistral .