Un film de Steven Spielberg, avec Harrison Ford, Cate Blanchett, Shia LaBeouf, Karen Allen, Ray Winstone, John Hurt et Jim Broadbent. États-Unis, 2008, 123 min. (« Indiana Jones et le royaume du crâne de cristal » en version française)
19 années se sont écoulées depuis la dernière aventure cinématographique de Indiana Jones (à réintituler L’avant dernière croisade) et cette plus récente production. Entre les deux, Harrison Ford a accepté de participer à des projets de plus en plus exécrables (Air Force One marque le moment où il a sauté le requin), George Lucas a massacré les trois premiers épisodes de sa série de Star Wars et Spielberg a commencé à exceller davantage comme réalisateur de drames historiques (Shindler’s List, Catch Me if You Can) que de films d’action (The Lost World, Minority Report). Sauront-ils unir leurs efforts pour retrouver leur gloire d’antan?

Non. Le moins on analyse l’intrigue rocambolesque de Indiana Jones et le royaume du crâne de cristal, le mieux on se porte. Indiana Jones (Harrison Ford), son fils (Shia Labeouf), son ex (Karen Allen) et son ancien collègue (John Hurt) doivent retrouver un crâne de cristal mythique avant que des méchants bolcheviques menés par Irina Spalko (Cate Blanchett) s’en emparent et s’en servent pour accéder à une arme paranormale cachée au coeur des citées d’or.
Les références historiques, comme l’a évoqué l’une de nos lectrices manquent totalement de véracité. Elles demeurent moins incroyables que les péripéties. Par exemple, dans les trente premières minutes, le Dr. Jones survit à l’explosion d’une bombe atomique qui le projette à une bonne centaine de mètres (!). Au moins, lors de cette séquence, Indy fait preuve d’ingéniosité en se planquant dans un frigo. La plupart du temps, il lui suffit de tenir le crâne de cristal pour éloigner le danger. De méchantes fourmis vous attaquent? Sortez le crâne de cristal. Une tribu cherche à vous faire la peau? Sortez le crâne de cristal. Une porte refuse de s’ouvrir? Le crâne de cristal agit comme clef.
Indiana Jones et le royaume du crâne de cristal aurait pu se nommer Indiana Jones et ses amis. Plutôt que de développer le personnage principal, Spielberg et compagnie l’entourent d’adjuvants plus lamentables les uns que les autres. Il y a Mac, un agent double qui n’existe que pour placer le héros dans l’embarras et fournir du travail à Ray Winstone. Il y a Henry Jones le troisième, une sorte de rejet de The Outsiders. Dès son arrivée dans le film, il mène les scènes d’action, reléguant son papa au rang de spectateur. Il y a Marion Ravenwood qui revient dans le décor. Celle qui assista l’aventurier dans sa recherche de l’arche perdue se voit forcée de prendre part à cette nouvelle quête. L’évolution de sa relation avec le professeur Jones trahit l’essence du personnage. Indiana Jones est un électron libre comme James Bond. Il ne fait pas partie d’une molécule familiale. Le professeur Oxley s’impose comme le plus minable de tous ces personnages secondaires. John Hurt est un grand acteur, c’est l’homme éléphant après tout. Ici, il joue un archéologue devenu fou au contact du crâne de cristal. Or, il ne paraît pas psychotique ou schizophrène mais simplement simple d’esprit. Il balbutie et agit comme un enfant agaçant. Quel dommage de voir un interprète de sa trempe jouer un rôle digne de Leslie Nielson.

Certains diront: « On s’en fiche de l’intrgue, du crâne de cristal magnétique, de Pancho Villa et tout le tralala… Est-ce amusant? ». Premièrement, je refuse de croire qu’il faut s’abrutir pour apprécier un film. Ensuite, les scènes d’action ne sont pas façonnées avec le même soin, ni les même matériaux, que celles qu’on retrouvait dans les chapitres précédents. Ces derniers représentaient des hommages aux serials d’antan et reprenaient les techniques employées par ces productions. Ici, les maquettes et mattes cèdent leur place aux images de synthèses. Les cascadeurs s’avèrent inutiles puisque la majeure partie des séquences spectaculaires se déroulent devant des fonds verts. La dernière poursuite traverse la frontière du ridicule quand une armée de singe assiste un Shia Labeouf qui s’improvise en Tarzan. La conclusion de cette séquence surpasse ce moment pathétique grâce au plongeon d’un véhicule amphibie amorti par une branche d’arbre qui, une fois les bons en sécurité, revient fouetter les méchants communistes.
À la tête de ces antagonistes soviétiques se trouve Irina Spalko. Cate Banchett lui donne vie avec entrain, offrant les plus vils regards de son répertoire. Malgré cela, son personnage se voit mal défini. Peut-elle lire dans les esprits? Recherche-t-elle le crâne pour elle-même ou son pays? Veut-elle pénétrer les cités d’or pour obtenir un grand savoir ou utiliser un grand pouvoir? Pourquoi tant de questions sans réponses?
La direction photo de Janusz Kaminski diffère de façon notable de celle du retraité Douglas Slocombe. Elle ne lui est toutefois pas inférieure. Il bouge la caméra avec grâce et parvient à composer des plans extraordinaires en exploitant la silhouette icônique du téméraire archéologue. À la trame sonore, l’efficace John Williams reprend aux bons moments le thème musical de la série. Quelques airs des années 50, comme Hound Dog de Elvis qui accompagne les premières images, se font entendre durant la projection. Ces chansons semblent plus à leur place dans American Graffiti que dans Indiana Jones.
Dans la grande histoire des déceptions cinématographiques, Indiana Jones et le titre trop long se classe plus près de A. I. que de The Phantom Menace. Il s’agit là d’une bien mince consolation. Si vous achetez un billet pour ce long métrage, ne vous étonnez pas de voir, dans les prochaines années, apparaître Beverly Hills Cop 4, Terminator 4 ou d’autres sottises du genre. Dans The Watchmen, Alan Moore suggère que lorsque les temps sont incertains, les populations se tournent vers la nostalgie. Bref, il ne faut pas blâmer Spielberg, Lucas et Ford pour cette oeuvre réchauffée. C’est à cause du 11 septembre.
Indiana Jones (D. Lamarre)
Ta critique me donne encore plus envie de le re-revoir! J’aurais juste une petite question : pourquoi es-tu allé voir cet Indiana Jones?
Je pose cette question car en lisant ton article, j’ai plus l’impression que tu t’attendais à revoir un des trois précédents films tant tu évoques la « nostalgie » des précédents opus. Si c’était le cas, les DVD existent (ou tout autre format, ne faisons pas de publicité^^).
Alors oui, cet Indy 4 est différent des précédents. Et alors? A-t’on blâmé James Bond lorsqu’il ne combattait plus les russes? Et bien maintenant Indy ne combat plus les nazis!!
Il faut aussi savoir une chose, c’est que les Indiana Jones sont à la base, et avant tout, des films hommages de l’époque. Si les 3 précédents célébraient les sérials des années 30, ce nouveau film se consacre lui aux films des années 50, dans tout ce qu’ils ont de plus absurde : un certain Johnny Weissmuller se balançant de lianes en lianes,… et c’est ce qui faisait le charme de ses films…
Enfin, c’est Indiana Jones! Pourquoi chercher le réalisme? Soyons honnêtes, vous attendiez vous à voir « Il faut sauver le soldat Ryan » ou « Munich »?
Bref, tout ça pour dire que ce genre de réaction hostiles à l’encontre des films de purs divertissement me fait froid dans le dos (note utile pour cette remarque : avec « Amélie Poulain » à 16 ans, j’ai fais plus de cauchemards qu’avec « Alien » dix ans plus tôt…)
Indiana Jones (D. Lamarre)
Alors, si je comprends bien, vous avez aimé la scène où Shia Labeouf se balance avec une armée de singes? Moi pas. Ça a plus sa place dans un cartoon de Goofy que dans un volet de Indiana Jones.
Je n’ai rien contre l’idée que Indiana Jones s’attaque à des ennemis différents des Nazis (comme dans Le temple maudit). Même les emprunts à Stargate ne m’offusquent pas. Ce qui m’achale, c’est le traitement reservé à Indiana Jones. Il aide ses adversaires et laisse ses adjuvants faire tout le travail.
Les solutions trouvées n’ont pas le même panache que jetter du sable sur une poutre invisible ou couper les câbles supportant un pont suspendu. Utiliser de la poudre à canon pour trouver un squelette magnétique? Déchiffrez les paroles d’un idiot? ZZZZzzzz…
Mes collègues ont bien aimé le film. Si vous voulez que vos opinions soient confirmées, lisez leur texte. De mon côté, je pense que le temps ne sera pas clément avec cette production. C’est dommage car les trois chapitres précédents semblent intemporels.