Un film de Ida Lupino avec Edmond O’Brien, Frank Lovejoy et William Talman. États-Unis, 1953, 71 minutes.
Qu’il est dangereux de faire monter un auto-stoppeur! S’il ne s’efforce pas de vous faire chanter (comme dans Detour), il vous prendra en otage et menacera de vous faire la peau. Voilà la délicate situation dans laquelle se trouvent plongés Roy (Edmond O’Brien) et Gilbet (Frank Lovejoy) lorsqu’ils essaient de rendre service à Emmett Myers (William Talman), un psychopathe au tempérament bouillant.
Tous ceux qui prétendent que les vieux films sont trop lents devraient regarder The Hitch-Hiker. Le long métrage n’est lancé que depuis cinq minutes que déjà l’antagoniste est responsable de trois homicides: un couple et un voyageur solitaire. Ida Lupino prend soin de ne pas révéler le visage du meurtrier lors de ces deux séquences, conservant ce moment pour mettre en valeur sa sinistre introduction dans la vie des deux amis.
William Talman rend son personnage le plus antipathique possible. Avec son oeil globuleux, ses cheveux dépeignés et sa barbe mal rasé, il a l’air d’un animal effrayé que même César (l’homme qui parle aux chiens) ne saurait maîtriser. Il débite toutes ses répliques sur un ton agressif et tient toujours, je dis bien toujours (il dort le pistolet au poing, un oeil ouvert!), une arme pointée sur les protagonistes. Le danger les guette en tout temps, qu’ils se trouvent dans l’automobile, dans un marché général ou au coeur de la campagne mexicaine.
Ida Lupino, l’une des rares réalisatrices oeuvrant à Hollywood à cette époque, su souligner l’horreur de ce cauchemar basé sur un terrible fait vécu. Pour ce faire, elle filma plusieurs scènes sincèrement angoissantes. C’est le cas, entre autres, de l’exercice de tir à la Guillaume Tell qu’impose sadiquement Emmett à Gilbert et Roy. Il y a aussi cet autre passage où un klaxon coincé vient presque sonner le glas des deux malheureux héros. Le son insupportable du criard ajoute au suspense de la séquence.
Elle-même une actrice accomplie, Ida Lupino dirigea de main de maître ses interprètes. Au fur et à mesure que se développe l’intrigue, les otages deviennent de plus en plus épuisés et désespérés tandis que le fugitif devient de plus en plus insolant et en confiance. Cette progression transparaît subtilement à travers les postures et attitudes de William Talman, Edmond O’Brien et Frank Lovejoy.
The Hitch-Hiker se révèle au moins 100 fois meilleur que cette merde du même nom. Comme quoi, mieux vaut louer des chefs d’oeuvre qui ont traversé le temps que regarder, sans discernement, les plus récentes sorties DVD.