Un film d’animation de Hayao Myazaki
Japon, 1984, 116 min.
Myazaki a atteint un certain renom en Amérique depuis les succès critique et populaire de Sprited Away (L’étrange voyage de Chichiro) et Princess Mononoke (Princesse Mononoke). Par contre, ce cinéaste d’animation japonais jouit d’une gloire incommensurable dans son patelin d’origine. On le considère comme le Walt Disney d’Asie. Nulles surprises alors à ce que le studio de Mickey distribue ses films dans notre pays. Alors que ses plus récentes créations, comme Howl’s Moving Castle sont projetés en salles, ses plus anciennes, tel Kiki’s Delivery Service, bénéficient d’un transfert DVD impeccable. Datant de 1984, Nausicaä se classe dans la seconde catégorie. En deux mots et un « d’ », Nausicaä est un chef d’oeuvre.
L’homme derrière le clavier, celui qui tape les lignes que vous lisez, ne se considère pas comme un sentimental. Bien que des films, pour reprendre une expression d’une chaîne de club vidéo de chez-nous, il en a vu des tonnes, jamais, ou presque, des larmes mouillèrent ses joues. Toutefois, l’histoire de Nausicaä l’a ému au point d’activer (un tantinet) ses glandes lacrymales. Comment rester de glace devant un personnage aussi noble que Nausicaä, la princesse de la vallée des vents, l’amie des insectes qui habitent la forêt toxique.
Il est permis de rêver que, par miracle, ce film fasse son chemin jusque dans le lecteur DVD de la Maison Blanche. Le Président, dans toute sa lucidité, se reconnaîtrait dans les actions agressives de la princesse Kushana, la dirigeante des forces militaires de Torumekia. Il associerait, tout aussi lucidement, les combattant de l’état insoumis aux guérilleros qu’il affronte de Baghdad à Kandahar. Il comprendrait le message du film qui soutient que les attitudes destructives des belligérants, qu’ils luttent en utilisant des armes de destruction massive ou en effectuant des sacrifices humains, ne peuvent se justifier. Il apprendrait de l’héroïne les valeurs chrétiennes du pardon et du sacrifice. Et fort de cette nouvelle vision de la vie, le Président ferait du monde, permettez-moi l’anglicisme, une meilleure place.
Au-delà de l’analogie politique qui, en vérité, pourrait s’appliquer à différentes guerres, Myazaki soulève des préoccupations environnementales. Dans le futur, le rapport de force entre l’homme et la nature est inversé. Cependant, la forêt toxique qui est perçue par tous sauf Nausicaä comme une nuisance, voire une menace, n’est toxique que parce qu’elle purifie les déchets toxiques laissés sur la surface de la Terre après une guerre globale. Si seulement le président Américain pouvait apprendre de Nausicaä comment, simplement, vivre en harmonie avec la nature…
La médiocrité de l’animation, des designs, ou du montage minerait indubitablement la qualité du film. Fort heureusement, le problème ne se présente pas. L’animation égale, voire dépasse les standards d’anime nippone. La qualité des dessins fascine. L’aspect des personnages dénote parfaitement leur attitude. Nausicaä est aussi aimable qu’elle le semble. Son guide spirituel, Yupa, est aussi sage qu’il en a l’air, même chose pour Kushana qui transpire le machiavélisme ou Asbel qui apparaît naïf et impétueux. Les décors, qu’il soit question de la forêt toxique ou du château de la vallée des vents, impressionnent par leur majesté. Le design des créatures et machines semblent à la fois possible et fantaisiste. En raison de l’efficacité du montage, l’intrigue très dense et complexe pour un film pour toute la famille, ne croule jamais sous le poids de longueurs inutiles.
S’il fallait noter des points négatifs, la fin abrupte ainsi que les maladroits monologues explicatifs devraient être soulignés. Par contre, ces légères imperfections ne déprécient en rien l’ensemble de l’oeuvre.
Bien que Nausicaä of the Valley of the Wind n’a pas été écrit en 1984 en guise de lettre ouverte à Georges W. Bush, les valeurs de tolérance, de respect de l’environnement et d’empathie que défend le film s’avèrent aussi, sinon plus pertinentes maintenant qu’elles ne l’étaient jadis. À voir absolument et à montrer à tous ses proches.