Le triangle russe

Un film aussi connu sous le nom Ruseli Samkudhedi de Aleko Tsabadze avec Konstantain Khabenski, Petr Mironov et Artiom Tkatchenko, Georgie, 2007, 123 minutes.


Le titre Russky Treugolkik (ou Le triangle russe) fait référence aux autorités russes, aux rebelles tchétchènes et aux civils coincés entre les deux. Toutefois, le titre pourrait aussi définir les trois côtés d’un film à la fois policier, politique et d’apprentissage.

Tiré de The Russian Triangle
Tiré de The Russian Triangle

Kolya, fraîchement diplômé de l’école de police, se joint aux autorités moscovites. Sa première scène de crime: un assassinat d’une précision militaire. Sa deuxième: un règlement de compte mortel. Seul Kolya perçoit une relation entre les deux crimes mais personne n’écoute le nouveau. Envers et contre tous, il veillera à faire la lumière sur cette triste affaire de guerre, de vengeance et de famille.

Artyum Tkachenko, vu cette année dans Mechenosets, y va d’une performance saisissante dans Le triangle russe. Kolya, son personnage, se voit confronté pour la première fois à toutes sortes de situations inhérentes au poste d’enquêteur. Premier cadavre, première fusillade, première expérience d’agent double. Chacun de ces éléments chocs secouent sa perception de son travail ainsi que de son rôle dans la société. Tkachenko rend bien la perte d’innocence de son personnage, de sa nonchalance initiale jusqu’à son endurcissement final. Ce changement d’attitude est même symbolisé par sa coupe de cheveux. Il commence le film avec un «  pad  » à faire frémir d’envie Jaromir Jagr puis le coupe quand il entreprend d’élucider le mystère à lui seul.

Tiré de The russian Triangle
Tiré de The russian Triangle

Dans le rôle d’un soldat russe souffrant du syndrome post-traumatique, Kostantin Khabensky de Night et Day Watch, insuffle du charisme et une menace latente appropriée à un vétéran de la guerre en Tchétchénie. Petr Mironov complète le trio en campant un ancien professeur de littérature devenu tireur d’élite pour venger sa famille décimée par les offensives russes dans son patelin. Entre ces deux antagonistes, traumatisés par les horreurs de la guerre, prêts à tuer ou mourir au nom de la vengeance, se dresse Kolya, jeune naïf et impuissant.

Tiré de The Russian Triangle
Tiré de The Russian Triangle

Les lieux où se déroule l’action, d’une capitale délabrée à une région à feu et à sang, font état d’un pays déchiré qui souffre atrocement de ses conflits intérieurs. En effet, bien des endroits censés représenter Moscou (le film a été tourné à Kiev) se trouvent aussi décrépit que les ruines tchétchènes. Les décors, au même titre que l’histoire, exposent que les belligérants ne sont pas les seules victimes du conflit armé. Selon ce que le réalisateur et scénariste Aleko Tsabadze a révélé au festival de films de Moscou en juin dernier: «  C’est la guerre. Nous en sommes victimes. Nous le sommes tous  ». Ce simple constat correspond à la réalisation solide mais sans éclat de Tsabadze. Il n’entrave d’aucun élément stylistique le déroulement d’une histoire intéressante à certains niveaux. Bien qu’il évite d’offrir un message politique moralisateur et présente des drames crédibles et touchants, l’intrigue policière qu’il construit pour structurer son récit manque de mordant. Le héros fait plus souvent preuve d’instinct (ou de chance) que de pouvoir de déduction.

Tiré de The Russian Triangle
Tiré de The Russian Triangle

Néanmoins, si la forme du film policier et sa banale exécution déplairont à certains spectateurs, son approche de biais des problèmes politiques russes et les tragédies humaines qu’elle révèle font du Triangle russe une oeuvre doublement pertinente. Présenté hors compétition.