I’m Not There

Un film de Todd Haynes, avec Cate Blanchett, Heath Ledger, Richard Gere et bien d’autres, États-Unis, 2007, 140 minutes.


Plutôt que d’employer un miroir pour refléter la vie de Bob Dylan, le cinéaste Todd Haynes emploie un prisme qui divise la vie du chanteur en six histoires parallèles, menées par 6 personnages inspirés de différentes périodes de sa carrière.

Sur fond de changement social, I’m Not There met en scène les métamorphoses vécues par l’artiste. De sa vie amoureuse en passant par sa vie familiale, jusqu’à sa place sur la scène musicale mondiale, il sera toujours tiraillé entre l’authentique et le faux, le collectif et le personnel, la sensibilité et la méchanceté.

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Toutefois, l’oeuvre de Haynes s’approche davantage de Pink Floyd’s The Wall ou du plus récent Accross the Universe que d’une biographie de Dylan. Ce symbolique portrait en son et image de la vie d’un icône américain aborde le thème fascinant du pouvoir de la musique sur les auditeurs et sur son auteur.

«  Le silence, c’est ce qui terrifie  » explique un jeune bluesman de 11 ans. Cette réplique lancée par la première incarnation de l’artiste annonce les couleurs du réalisateur: vos oreilles n’auront pas de répit. La musique de, et adaptée de, l’interprète de Knocking on Heaven’s Door n’est que rarement entrecoupée de dialogues ou de monologues en voix-off. Le son de cet opus est si riche qu’il serait facile de suivre le film les yeux fermés.

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Toutefois, vous manqueriez le jeu fantastique de Cate Blanchett, cigarette au bec, manteau de cuir noir sur les épaules et lunettes fumées sur le nez, dans une imitation impeccable et dérangeante (vous ne verrez plus jamais Galadriel ou la reine Elisabeth de la même façon) de l’auteur compositeur et interprète. Vous rateriez aussi l’éblouissante direction photo qui jongle avec des images en noir et blanc au grain proéminent et d’autres aux couleurs parfois réalistes, parfois surréalistes. À chaque récit correspond un style différent, ce qui permet de se repérer aisément dans les fils entremêlés.

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D’ailleurs, le montage son et image entre les récits est fantastique, assurant un rythme soutenu et agréable. Entre les histoires entre-chassées se dégagent des parallèles signifiants. Par exemple, les habitants costumés de Riddle (ville fictive où se croisent deux versions de Dylan, la première jeune et naïve ainsi que la dernière âgée et désabusée) correspondent aux artistes excentriques qui entourent le chanteur lors de son passage en Angleterre.

Si vous n’avez toujours pas vu I’m Not There, une question s’impose: où êtes-vous? Facilement l’un des meilleurs films de l’année, assurément un accomplissement impressionnant pour tous les artisans québécois qui ont contribué à cette production, le film de Todd Haynes vous marquera comme les meilleurs chansons de son sujet.