Un film de Andy et Larry (Lana?) Wachowski avec Emile Hirsh, Christina Ricci, Susan Sarandon et John Goodman, États-Unis, 2008, 2h15 (!).
Étrange bolide que cette version 2008 de Speed Racer montée par les frères Larry et Andy Wachowski. Ce véhicule hybride carburant à la nostalgie allie prises de vue réelles et images de synthèse dans des proportions semblables aux plus récents films de George Lucas. Comme les nouveaux Star Wars, le dernier né des créateurs de The Matrix s’avère aussi ambitieux que décevant…
Malgré le décès en piste de son frère aîné, Speed a toujours eu qu’une idée en tête: courir pour l’écurie familiale Racer dans la World Racing League. Ses prouesses derrière le volant du Mach 5 attirent rapidement l’attention d’un businessman malhonnête qui lui révèle un terrible secret: les grands prix sont truqués. Avec l’aide de ses parents, de ses amis et du mystérieux Racer X, Speed parviendra-t-il, à la manière de Jonathan dans Rollerball, à mettre fin à la corruption qui ternit son sport?
Parfois, Speed Racer roule rondement. Les frères Wachowski composent des images impressionnantes et des gags visuels amusants comme un singe portant un pyjama Paul Frank. Les quarante premières minutes emploient bien les codes de « l’anime » japonais pour définir en quelques plans les personnages colorés et le monde fantaisiste qu’ils habitent. La dernière course exploite à merveille le look psychédélique du dessin animé des années ’60 pour réussir un crescendo qui atteint son apogée lorsque le fil d’arrivé est traversé. Cependant, entre les deux, le film tourne en rond en accordant beaucoup trop d’importance à une course de rally qui rappelle de mauvais souvenirs de la course de « pods » de The Phantom Menace. Bref, s’étire inutilement au delà de deux heures une histoire banale qui aurait pu être racontée en 1h30.
L’omniprésence des trucages informatiques et le style visuel calqué sur le « cartoon » laissent pantois quant aux raisons qui ont motivés les cinéastes à tourner, ne serait-ce qu’en partie, cette production avec des caméras plutôt que de la dessiner et l’animer complètement. Normalement, la présence d’acteurs du calibre de Emile Hirsh, John Goodman, Susan Sarandon et Christina Ricci devraient rehausser les moments dramatiques. Toutefois, les dialogues simplets, le jeu exagéré et sans nuance des interprètes et l’aspect prévisible de la trame narrative annulent l’impact des conflits. À dire vrai, de tous les personnages, c’est le primate Chim Chim qui se démarque.
Speed Racer représente un cas clinique de forme qui prime sur le contenu. Son protagoniste est dépeint comme le Bruce Lee du volant. Comme le dragon, il maîtrise sa discipline au point d’en faire un art. Or, avec toutes les images de synthèse et la physique impossible à laquelle obéissent les automobiles sautantes de la WRL, Speed donne davantage l’impression d’être un as des jeux vidéos qu’un pilote hors pair. C’est beaucoup moins spectaculaire que contempler Bruce Lee qui donne des coups de pieds à des cascadeurs malchanceux. Aussi, si vous n’avez jamais joué avec des voitures miniatures, vous ne comprendrez pas grand chose aux courses présentées. Les voitures ne respectent pas les préceptes de la gravité. On dirait plutôt que des gamins géants et invisibles les déplacent avec leurs mains.
Les séquences de kung fu sorties de nul part sont symptomatiques des excès auxquels se livrent les frères Wachowski. Trop long, trop faux, trop simplet, Speed Racer ne s’élève pas à la hauteur des ambitions des réalisateurs ou des attentes des fans de la série. Un dérapage unique en son genre.