Un film de Tomas Alfredson, avec Kare Hedebrant et Lina Leandersson. Suède, 114 minutes.
Let the Right One In se veut un film de vampire pour ceux qui n’aiment pas les films de ce genre. Tomas Alfredson ne place pas l’emphase sur des scènes d’action, des moments d’horreur, des plans dégoûtants, et des séquences de sexualité charnelle. Son intrigue au développement lent comme une tortue à trois pattes se concentre sur la relation d’amitié qui s’établit entre deux voisins de pallier de 12 ans, l’un blondinet et taciturne, l’autre vampire et orpheline.
L’oeuvre n’est pas, pour autant, dépourvue de moments forts comme cette violente attaque menée par une meute de chats, cette combustion spontanée d’un vampire au contact des rayons du soleil ou ce déversement de sang lorsque l’héroïne passe le seuil d’une porte sans y être invitée. Mes ces images impressionnantes demeurent moins marquantes que la relation entre les deux protagonistes. L’un aspire à devenir fort pour qu’on cesse de le tourmenter, l’autre recherche quelqu’un d’assez ouvert d’esprit pour l’accepter avec son petit défaut (tuer pour vivre) et mettre fin à sa solitude.

L’absence de support parental représente leur point commun. Le père (adoptif?) de la vampire s’avère être le tueur en série le plus maladroit de l’histoire du cinéma. Son incompétence l’éloignera de sa protégée. Quant au jeune garçon, ses parents divorcés ne le placent pas au sommet de leurs priorités. Son père préfère boire un coup avec ses amis tandis que sa mère passe plus de temps au travail qu’à la maison. Laissés à eux-mêmes, les deux gamins solitaires doivent trouver leurs propres repères moraux et se protéger l’un l’autre.
Par ce thème de la famille éclatée et de cet ami paranormal, l’oeuvre évoque une version médium saignante de E.T.. Comme pour le classique de Spielberg, le film compte sur une direction photo extraordinaire. Pour les films de genre, on qualifie souvent une direction photo de réussie lorsqu’elle semble tout bonnement professionnelle. Pour Let the Right One In, les images tournées par Hoyte Van Hoytema dépassent ce niveau d’expertise. L’usage adroit de la profondeur de champ et de cadrage resserrés pour centrer les plans au niveau de ses protagonistes rappellent la signature d’un artiste de chez-nous: André Turpin.
En raison de son esthétisme soigné et de son drame à la fois touchant et pertinent, Let the Right One In se taille une place de choix dans le panthéon des films de vampires. Visionnez le en version originale avant son incontournable adaptation américaine.