Un documentaire de Oliver Stoltz et Ali Samadi Ahadi, Allemagne, 2005, 97 min.
Les premières images de Lost Children montrent une équipe de travailleurs sociaux de l’Ouganda qui recueillent un enfant malfamé et blessé. L’état pitoyable du pauvre petit glace le sang. Difficile à croire que le reste du film présentera des images beaucoup plus épouvantables et des histoires encore plus terribles.
Comment faire autrement quand on explore les destins tragiques des enfants soldats? De jeunes âmes innocentes sont kidnappées, forcées à être témoins ou, pire encore, à commettre les pires atrocités et finissent, plus souvent qu’autrement, comme de la chair à canon.
Les réalisateurs Oliver Stoltz et Ali Samadi Ahadi montrent comment les quelques « chanceux » qui parviennent à s’échapper des miliciens de la Lord’s Resistance Army demeureront traumatisés et marginalisés. Peut-on vraiment en vouloir aux parents de ne pas accueillir à bras ouverts leurs enfants devenus meurtriers ou prostituées, même si c’était par nécessité?
Le documentaire choc soulève un autre point significatif. Les enfants qui réintègrent la société redeviennent des victimes potentielles des miliciens. Certains avouent qu’ils préféraient être soldats. Simon & Garfunkel seraient du même avis, si l’on se fie à ce vers de El Condor Pasa: « I’d rather be a hammer than a nail » (Je préfèrerais être le marteau plutôt que le clou).
Que les coeurs sensibles soient prévenus, des images horrifiques pullulent dans ce film. Des cadavres empilés sont aperçus ainsi que des plaies ouvertes infectées. Toutefois, les témoignages des enfants s’avèrent encore plus déstabilisants. Un gamin raconte, avec le sourire, comment il a été forcé de manger de la cervelle humaine. Un autre explique comment les ravisseurs ont demandé à une fillette de lancer et rattraper la tête de son petit frère à quatre reprises au risque de subir le même sort. Il y a lieu de se demander si les cinéastes exagèrent, s’ils n’exploitent pas le malheur de ces enfants à des fins sensationnalistes. Cette impression n’est qu’amplifiée par la quasi-absence d’explication politique ou sociale de la crise humanitaire (seul un texte d’une trentaine de mots expose la situation au début) et la complète absence de pistes de solution.
Néanmoins, compte tenu de la gravité de la situation, tous les documents la décriant deviennent nécessaires. Visionnez ce film important au risque de perdre toute confiance dans le genre humain.